La charge mentale est mouvante, difficile à évaluer et, de ce fait, souvent invisible. Ses effets physiques et psychiques varient d’une personne à l’autre. Nous ne sommes pas tous à égalité face au niveau de charge mentale que nous pouvons supporter avant de se sentir submergés.
Dans cet article, synthèse du webinaire organisé et animé par Fabienne Broucaret de My Happy Job, Virginie Boutin, coach professionnelle et présidente de Bloomr Impulse, et Clément Poirier, psychologue du travail, explorent les risques liés à la surcharge mentale et partagent quelques conseils pour les minimiser.
Le terme de charge mentale a d’abord servi à désigner le poids que fait peser, en particulier sur les femmes, la gestion des tâches domestiques et éducatives, additionnée aux autres obligations, engendrant une fatigue physique et psychique.
L’expression s’est ensuite étendue au domaine professionnel.
Au travail, la charge mentale exprime la quantité d’informations à traiter, de décisions à prendre, de tâches à accomplir à laquelle nous sommes quotidiennement confrontés.
C’est donc un phénomène que nous vivons tous. Et tous, nous avons un seuil à ne pas dépasser au risque de basculer dans la surcharge mentale.
En effet, nos capacités cognitives sont naturellement limitées, en particulier nos capacités d’attention et de mémorisation.
Il nous est impossible d’être attentifs à tout, tout le temps, de tout voir, tout entendre. Nous avons, au contraire, besoin de faire constamment le tri dans les stimulations pour sélectionner ce sur quoi nous allons porter notre attention, et ce tri demande un effort cognitif.
Nous ne sommes pas non plus capables de tout retenir; notre mémoire à court terme, en particulier, nous permet de ne retenir qu’un certain nombre d’informations à la fois et pendant un certain temps, après quoi notre mémoire sature et il nous faut faire de la place à de nouvelles informations. On estime ainsi qu’on ne peut retenir que 7 éléments à la fois, en moyenne.
Ces limites à nos capacités cognitives sont naturelles, utiles et salutaires - elles nous protègent des effets délétères d’une surcharge mentale. Lorsque notre attention est sur-stimulée, qu’on se retrouve à devoir prendre une multitude de décisions ou à devoir retenir trop d’informations, nos capacités cognitives sont dépassées et c’est la surchauffe.
Là où cela devient particulièrement problématique, c’est lorsque cette surchauffe devient chronique et que la surcharge mentale s’installe dans la durée. Les conséquences se font alors ressentir sur la santé tant mentale que physique.
Or, dans un monde marqué par la complexité, l’hyperconnexion, l’infobésité, la vitesse, l’instantanéité, et la course à la productivité, les risques de surcharge mentale sont de plus en plus élevés.
Autres facteurs de risque, une charge de travail trop lourde, bien entendu, certaines pratiques organisationnelles, notamment le multitasking, et la multiplication d’interruptions dans les journées de travail, ainsi qu’un usage excessif / non maîtrisé du numérique.
A noter par ailleurs que la surcharge mentale au travail est souvent aggravée par la surcharge mentale domestique, liée aux responsabilités d’ordre personnel et familial, et la nécessité de jongler entre un grand nombre d’obligations et d’engagements.
Les signes de surcharge mentale sont nombreux et proches de ceux liés au stress - l’une empire souvent l’autre, d’ailleurs.
La surcharge mentale peut se traduire par :
Les répercussions de la surcharge mentale sont donc nombreuses et d’ordre aussi bien physique que psychologique. Elles touchent, par ailleurs, aussi bien l’individu que le collectif.
Heureusement, des bonnes pratiques existent pour s’en prémunir et y faire face.
Il s’agit de choisir intentionnellement et avec parcimonie ce qui mérite notre attention, et de se protéger du reste.
Pour cela, différentes méthodes et astuces existent :
Ce sont de nouvelles compétences à développer.
D'un point de vue collectif, toute équipe aurait intérêt à initier une discussion sur le sujet, pour comprendre les ressentis et les besoins des uns et des autres sur ce sujet, et s’accorder sur des règles et bonnes pratiques communes
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La prochaine fois que vous vous trouvez dans une file d’attente, résistez à l’envie d’attraper votre smartphone et, à la place, observez. Essayez de nommer dans votre tête ce que vous ressentez, ce que vous percevez que ce soit à l'intérieur ou à l'extérieur, les sons, les images, les sensations physiques.
C'est un moyen de revenir au réel plutôt qu’au mental, de se recentrer sur l'instant présent et d’arrêter le petit vélo qui tourne en permanence dans le cerveau.
Il s’agit de se fixer une liste de choses à faire, en fonction de ses obligations et de ce qu’on se sent en capacité d’accomplir, et d’éviter d’y déroger en refusant autant que possible d’y ajouter de nouvelles demandes extérieures.
Une posture qui peut sembler difficile à assumer au sein d’une équipe, mais qui devient aisée à adopter lorsqu’elle prend une dimension collective.
Cela requiert un ajustement dans les pratiques, pour accepter que chacun.e s’autorise à refuser une demande, une tâche nouvelle, ou tout du moins à négocier les délais lorsque son emploi du temps est déjà plein. Une bonne communication est, bien entendu, indispensable, pour que cela puisse se faire sereinement.
Cela implique, pour chacun.en de prendre du temps pour soi, pour s’interroger sur ses propres limites et capacités.
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Le sentiment de surchauffe est souvent accentué par l’impression d’avoir milles choses en tête et d’être submergé.
Rendre la charge mentale tangible, en listant, concrètement, tout ce qu’on a à faire, puis en rangeant, hiérarchisant et priorisant cette liste peut grandement apaiser le cerveau. Le cerveau adore la visualisation.
Cela permet à la fois de prendre du recul, d’évaluer effectivement ce qu’il y a à faire, et de se libérer lorsque quelque chose est terminé. La méthode Kanban peut par exemple être utilisée pour gérer sa liste de choses à faire.
De la même façon, lorsqu’on se surprend à ruminer, notamment le soir, poser par écrit ce qui nous passe par la tête aide à se vider l’esprit.
Les routines, les habitudes, permettent de structurer la journée, et de limiter les décisions à prendre, ce qui réduit la charge mentale. Ce qu’on fait par automatisme demande beaucoup moins d’énergie, mentale en particulier.
Ces rituels peuvent être individuels (notamment les rituels du matin et du soir) ou collectifs.
Pourquoi ne pas proposer à son équipe de réfléchir, ensemble, à des tâches ou habitudes qui pourraient éventuellement être supprimées, parce qu’elles ajoutent inutilement de la charge mentale ?
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Comment alerter son manager sur une surcharge de travail ?
Plutôt que d’aller voir son manager avec le message “j’ai trop de travail”, ce peut être une bonne idée de préparer à l’avance des suggestions de priorisation, puis lui exposer la situation, exprimer ses besoins, et lui expliquer comment on propose de s’organiser, ce sur quoi on a envie de porter notre attention, et comment on pourrait changer notre façon de travailler pour se sentir moins submergé.e.
Les pauses ne sont pas un petit luxe ou un plaisir coupable que l’on peut s’accorder de temps à autre.
Elles font partie des ingrédients essentiels d’une journée de travail saine et efficace !
Eh oui, pour travailler mieux, il peut être bon de travailler régulièrement un petit peu moins.
Quelques exemples de pauses régénérantes : du mouvement, se lever, aller chercher un verre d'eau, aller parler à un collègue, observer la nature dehors…
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Lutter contre la surcharge mentale implique souvent d’accepter de ne pas pouvoir tout faire, tout savoir, tout gérer. De renoncer.
Pour relever ce défi, cela aide de se concentrer sur les réussites plutôt que sur les manquements, et de braquer les projecteurs sur ce qui a été accompli plutôt que ce qui reste à faire.
En fin de journée, on peut par exemple prendre un moment pour faire un arrêt sur image et se féliciter du travail terminé.
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Une des difficultés avec la charge mentale, c’est qu’on ne la voit pas. Il est ainsi difficile de mesurer le poids que la charge mentale fait peser sur un collègue, si ce dernier n’en parle pas.
Puisque ce sujet nous touche tou.te.s, nous avons tout intérêt à prendre l’habitude de s’en parler, collectivement.
Cela permet, à la fois, de prendre conscience que tout le monde est dans la même situation ou presque, de s’échanger les astuces entre pairs, et de prendre mutuellement soin les un.e.s des autres.
Cela passe notamment par une attention accrue à son entourage : se demander sincèrement comment ça va, notamment quand on constate un changement de comportement, s’en enquérir avec bienveillance.
Créer des moments de discussion propices à l’échange, cultiver l'écoute et inviter chacun.e à évoquer son propre niveau acceptable de charge pour maintenir l’équilibre.
Si on est manager, demander spécifiquement des retours sur les niveaux de charge et faire participer l'équipe à l'organisation de cette charge. Instaurer une culture de l’autonomie et du feedback.
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En matière de charge mentale, il y a un certain nombre de facteurs aggravants sur lesquels les collaborateurs n’ont pas la main : la charge de travail, la culture de l’entreprise, les pratiques managériales, la qualité des relations…
Pour autant, parmi les bonnes pratiques qui ont été évoquées lors du webinaire, la plupart relèvent de comportements et de postures qui peuvent s’apprendre et se cultiver.
Chez Bloomr Impulse, nous proposons une série de formations en ligne pour aider les collaborateurs à gagner en sérénité au quotidien :
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